L’éthique de la permaculture
Les 3 principes éthiques de la permaculture
Prendre soin des humains
La permaculture est un mouvement humaniste qui vise à améliorer la qualité de vie des hommes et des femmes. Pour prendre soin des autres, il est nécessaire de prendre soin de soi… Vaste programme que de sortir du stress, de la course contre la montre ou de la tension pour assurer la satisfaction de ses besoins matériels, éviter les relations insatisfaisantes ou les carrières non choisies. La permaculture n’est pas pour autant une méthode de développement personnel (à chacun de s’en construire une selon ses goûts). Elle nous invite simplement à prendre la responsabilité de notre propre vie.
A l’échelle collective, prendre soin des humains implique d’être attentif aux conditions indirectes de nos choix. Nos achats notamment peuvent être plus ou moins respectueux de tous ceux qui on participé « à la création de valeur » du produit que nous désirons.
Du point de vue général, un projet qui maltraiterait les personnes qui y travaillent ou nuirait à une population voisine ne saurait en aucun cas relever de la permaculture.
Prendre soin de la terre
Un regard distancié nous montrerait que ce second principe éthique est contenu dans le premier. Pourrions nous vivre bien sur des sols morts et stériles, dans un air pollué un climat violent, buvant une eau non potable, peinant à faire fructifier de maigres cultures ? Le bon sens et l’auto-protection nous invitent à prendre grand soin de notre environnement naturel et de sa biodiversité. De plus la permaculture reconnait à tout être vivant une valeur inestimable, simplement en tant qu’expression de la diversité du vivant. Tant par respect que par admiration de la beauté de la nature, la permaculture se met au service de toutes les formes de vie.
La notion d’espèce nuisible n’existe pas en permaculture. Il peut y avoir des espèce non désirées, voire des déséquilibres importants de l’écosystème créé qui entrainent des pullulations problématiques. Diverses techniques et approches permettent alors de reconstruire un équilibre harmonieux en gardant à l’esprit que chaque espèce a son rôle dans la biosphère, quand bien même il nous échapperait, ce qui est souvent le cas.
Trouver sa juste part
Il existe différentes formulations de ce troisième principe : « partage équitable » ou « limitation de la population et de la consommation », « redistribuer les surplus » apparaissent régulièrement dans les ouvrage de permaculture. Il s’agit dans tout les cas d’un principe d’auto-régulation qui invite à la réflexion sur l’étendue de nos besoins. Le philosophe Patrick Viveret montre avec brio comment la société de consommation s’appuie sur une vaste entreprise de manipulation (la publicité) dont l’effet est de nous faire confondre nos désirs et nos besoins. Les besoins, si fluctuantes que puissent en être leurs définitions, peuvent être satisfaits ; ils ont une limite : par exemple personne ne peut manger 100kg de nourriture par jour. Nos désirs par contre sont potentiellement infinis : j’aimerais visiter Mars, Hong-Kong et le fond des océans en un week-end. C’est bien sur impossible et ridicule. Pourtant, notre société génère des sur-concentrations de richesse anormales : des individus possèdent à titre individuel des fortunes évaluées en milliards, et ces individus sont souvent perçus comme des modèles de réussite. Aucune autre espèce vivante ne se livre à un tel excès d’accumulation de ressources.
Dans la nature, toute population est régulée « par le haut » : par ses prédateurs, ses maladies et parasites, ainsi que « par le bas » en fonction de la quantité de nourriture disponible. L’humanité s’est extraite des régulations naturelles en détruisant tous ses prédateurs et grâce aux progrès de la médecine qui limite fortement l’impact des maladies et parasites. De plus nous produisons d’énormes quantités de nourriture en consommant des quantités bien supérieures d’énergie fossile (nous dépensons environ 10 calories de pétrole pour produire et acheminer une calorie de nourriture dans notre assiette.) Gardons néanmoins à l’esprit que 800 millions d’humain souffrent de la faim, mais non en raison des limites du milieu naturel mais à cause de l’inefficacité de nos modes de partage, notamment « le marché ».
Les permaculteurs, comme tout un chacun, se réjouissent de ne pas vivre dans la peur des bêtes sauvages, de la faim ou de la maladie. Le « progrès » est bien réel sur ses aspects. Mais libérés des limitations naturelles, nous n’avons pas su créer nos propres limitations.
Si nous avons des enfants, nous sommes heureux de les voir grandir. Du moins jusqu’à la fin de l’enfance, s’ils ont de plus le bon goût de s’arrêter de grandir quelques centimètres avant de dépasser leurs parents, nous serons pleinement satisfait. Mais que penserait-on s’ils continuaient de grandir et nous dépassaient (ce qui est fréquent), continuaient de grandir et dépassaient les deux mètres (ce qui est rare), continuaient de grandir et dépassaient trois mètres et continuaient de grandir… quelque chose n’irait pas! ce serait profondément non-naturel ! Il ne nous vient pas à l’idée d’estimer nos enfants à l’aune de leur taille et d’espérer qu’ils deviennent de plus en plus géant. Non, une fois qu’ils ont atteint un taille raisonnable, nous espérons les voir continuer à grandir d’une autre manière : grandir en maturité, en gentillesse, en compétence… (merci à Rob Hopkins à qui j’emprunte cette image).
Notre société est aujourd’hui libérée de toute limitation naturelle, et s’est bâti un projet d’un développement économique infini. Pas de limite, toujours plus toujours, plus vite… On peut considérer que les sociétés développées sont en pleine crise d’adolescence ! Nous sortons en effet d’une croissance ultra-rapide qui change nos perspectives : après des milliers d’années à moins de 500 millions de terriens, l’humanité comptait environ 2 milliards d’individus en 1900, en l’an 2000 nous étions environ 6 milliards. En 2014, nous avons dépassé les 7 milliards, les prévisions annoncent 9 à 10 milliards d’êtres humains en 2050.
La planète abrite des ressources énergétiques et minérales en quantité grande, mais pas infinie. Notre niveau de consommation et sa croissance exponentielle (appelée par les vœux de tous les politiques et économistes) nous mettront en situation de « rupture de stock » dans les prochaines générations. Il est probable que la production d’énergie fossile soit très proche de son maximum historique et qu’elle se mette à décroitre d’ici une à trois décennies. La permaculture propose donc de préparer la « descente énergétique », longue phase de transition vers une société non dépendante des combustibles fossiles. Cette perspective est essentielle à la définition de ce que peut être « notre juste part », de ressources énergétiques, de procréation, d’influence sur le climat… Des outils sont disponibles pour aider chacun dans son estimation de sa juste part :
L’empreinte écologique nous permet d’estimer simplement si notre mode de vie est soutenable.
Le bilan carbone permet d’évaluer l’impact de notre mode de vie sur le climat. Sur ce site, vous pouvez estimer votre propre bilan carbone et avoir des pistes concrètes pour le diminuer.
La démographie est plus simple en termes d’indicateur : au delà de deux enfants par couple, la population mondiale augmente.