Vers l’autonomie alimentaire 3
(Vers l’autonomie alimentaire partie 2)
A quoi ressemble une ferme permettant l’autonomie alimentaire ?
Les « fermes d’avenir » (il en existe déjà plusieurs dizaines en France) cultivent une diversité de produits pour une alimentation durable : des légumes, des légumineuses, des fruits, des produits d’élevage et quelques céréales.
Ci-dessous, nous présentons quelques études montrant l’intérêt de la production en agroécologie et permaculture, puis reprenons quelques évaluations de surfaces nécessaires pour produire la nourriture dont les Français ont besoin. Ces chiffres doivent aider les paysans inspirés par le modèle de micro ferme à décider quelle surface ils allouent à quels aliments.
Le mode de production alimentaire influe sur la qualité nutritionnelle des aliments
Une étude menée en 2014 par des agronomes de l’Université de Berkeley (Californie) tend à réduire l’écart constaté entre les rendements de l’agriculture bio et ceux de l’agriculture conventionnelle et donner de nouveaux espoirs pour le développement de l’agriculture bio.
20% à 25% de différence de rendement entre la bio et la conventionnelle, c’est ce qu’avaient démontré deux précédentes études, publiées en 2012 par des chercheurs des Pays Bas et du Canada.
Une nouvelle équipe du Berkeley Food Institude a souhaité revisiter ces statistiques avec une série de métadonnées trois fois plus importante que précédemment (soit 115 études contenant plus de 1 000 observations). « Dans la série de données collectées sur les 35 dernières années, et concernant 38 pays et 52 types de cultures, il nous apparaît que les rendements biologiques sont inférieurs de seulement 19,2 % par rapport aux rendements conventionnels. » affirme Mme Kremen qui a piloté les recherches.
Cette baisse d’écart mérite d’être signalée, mais Mme Kremen et son équipe ne s’arrêtent pas là dans leurs conclusions. « Nous avons pu constater que cet écart peut tomber à 8% en utilisant les techniques de rotation des cultures, et à 9% avec celle des polycultures. » C’est la conclusion majeure de l’étude de Berkeley.
L’importance sur le plan nutritif de modes de production biologique
(extraits d’un article excellent du 20 janvier 2015 de Terra Eco)
« Une dizaine d’études d’universités canadiennes, américaines et britanniques, publiées entre 1997 et aujourd’hui, font état d’une dégringolade de la concentration en nutriments dans nos aliments. Ces travaux, résumés dans l’étude « Still no free lunch » de Brian Halweil, chercheur au Worldwatch Institute confirment l’essor de la « calorie vide » : grasse, sucrée, mais inutile pour la santé. Même dans les aliments réputés sains, vitamines A et C, protéines, phosphore, calcium, fer et autres minéraux ou oligo-éléments ont été divisés par deux, par vingt-cinq, voire par cent, en un demi-siècle. Pour retrouver les qualités nutritionnelles d’un fruit ou d’un légume des années 1950, il faudrait aujourd’hui en manger une demi-cagette.
Hier, quand nos grand-parents croquaient dans une Transparente de Croncels (variété de pomme créée en 1869 et plantée sur la ferme de la Bourdaisière), ils avalaient 400 mg de vitamine C, indispensable à la fabrication et à la réparation de la peau et des os. Aujourd’hui, les supermarchés nous proposent des bacs de Golden standardisées, qui ne nous apportent que 4 mg de vitamine C chacune, selon Philippe Desbrosses, docteur en sciences de l’environnement à l’université Paris-VII. Soit cent fois moins. « Après des décennies de croisements, l’industrie agroalimentaire a sélectionné les légumes les plus beaux et les plus résistants, mais rarement les plus riches sur le plan nutritif », déplore ce militant pour la préservation des semences anciennes.
Les facteurs de ce déclin sont multiples. Des sols plus pauvres, des végétaux cueillis trop tôt, des traitements de conservation plus fréquents, des croissances plus rapides dopées par les engrais et une réduction du nombre de variétés, sélectionnées pour leur résistance aux parasites et leur rapidité de croissance… Autant d’éléments imputables à une quête de meilleurs rendements. Résultat, « pour le maïs, le blé et le soja, plus le rendement est important, plus le contenu en protéines est faible », note Brian Halweil, dans son étude. Même schéma pour les concentrations de vitamine C, d’antioxydants et de bêtacarotène dans la tomate : plus les rendements augmentent, plus la concentration de nutriments diminue.
A contrario, « l’agriculture biologique peut contribuer à inverser la tendance », indique Brian Halweil dans son étude. De fait, à conditions climatiques équivalentes « les aliments bios contiennent significativement plus de vitamine C, de fer, de magnésium et de phosphore que les autres ». Le chercheur met pourtant en garde : « Si les agriculteurs bios développent un système riche en intrants avec des rendements comparables aux exploitations conventionnelles, le bio verra son avantage nutritionnel s’éroder. » De même, si les produits bios sont cueillis avant maturité, ils sont finalement moins riches en nutriments que des produits mûrs de l’agriculture traditionnelle. Seule stratégie pour remettre de la vie dans son assiette : choisir des aliments mûrs, produits de manière non intensive et partir à la chasse aux variétés oubliées. »
Pour une autonomie en légumes et fruits
Selon l’édition trimestrielle de Rustica, série « Tout en un, Le potager, c’est facile ! » (Février-mars-avril 2005), un jardin de 250 m2 peut répondre aux besoins en fruits et légumes d’une famille de quatre personnes. Sur une parcelle inspirée de la permaculture, on peut diviser cette surface par 2 minimum, voire par 5.
Toujours selon Rustica, dans son trimestriel : « Le potager, c’est facile ! » (déjà cité ci-dessus), un jardin familial de 250 m2 nécessite de consacrer une heure de soins par jour de mars à mai, puis quelques heures par mois jusqu’en septembre, et une journée à l’automne, et une en fin d’hiver. il faudra alors produire 72 kilos de légumes, 75 kilos de fruits et quelque 35 kilos de pommes de terre par an et par personne composant un foyer, si on se base sur les statistiques de consommation disponibles.
Références : portail http://www.fruits-et-legumes.net. Document Achats de fruits et légumes frais par les ménages français (Panel Sécodip CONSOSCAN, avril 2005)
Pour une autonomie « totale » (hors viande et poissons, les protéines étant apportées par les légumineuses)
Les travaux ci-dessous montrent qu’il faudrait environ 1000 m2 à 1500 m2 de culture pour nourrir un être-humain (céréales, oléagineux, légumes, et fruits). On se base sur un objectif de production d’un kilogramme de nourriture par jour et par personne.
En diversifiant les plantations axées sur sept sortes d’aliments à raison d’environ 50 kg de chaque, cela donnera alors 350kg (en arrondissant donc, les 365 kg dont on a besoin, chacun).
Les surfaces ci-dessous sont inspirées des travaux du blog de Monautarcie, et complétées par des analyses en termes de rendement de cultures françaises en agriculture biologique. Bien évidemment, ces surfaces sont à prendre avec précaution car dépendent de multiples facteurs.
– 60 kg de céréales (blé, orge, seigle, maïs, avoine, etc…) cultivés sur 450m2 (rendements en culture non mécanisée, en bio) ou sur 200m2 (rendements en culture mécanisée bio) avec 1,5 kg de semences.
– 50 kg d’oléagineux (noix, noisettes, graines de courge, tournesol, pavot, colza, etc…) cultivés sur 400m2
– 50 kg de pommes de terre (+ autres tubercules, châtaignes, etc…) cultivés sur 20m2 avec une centaine de plants de pommes de terre p.ex. Donnée de base : rendement de pommes de terre : 2,5 kg / m2.
– 60 kg de fruits (pommes, poires, raisins, etc…) cultivés en vivaces sur environ 120m2.
– 50 kg de choux (divers y compris rutabagas, navets, etc…) cultivés sur environ 20m2.
– 50 kg de légumes (carottes, oignons, poireaux, céleris, etc…) cultivés sur environ 30m2.
– 30 kg de légumineuses (haricots, pois, (secs) etc…) cultivés sur 120m2 avec 2 à 3 kg de semences.
Liens
IRABE : Institut de recherche en agriculture biologique pour l’Europe
Blog de monotarcie : témoignages d’expériences de cultures de légumineuses. Une page très intéressante sur les surfaces nécessaires pour un agriculteur non professionnel pour cultiver les céréales notamment.