Observer et Interagir
C’est le premier des douze principes de permaculture énoncés par David Holmgren. La présentation ci-dessous s’inspire fortement du livre de « Permaculture, Principes d’action pour un mode de vie soutenable » de D. Holmgren. Les citations en italiques sont tirées de cet ouvrage.
Observer et interagir
La permaculture, comme toute activité de conception, débute par une phase d’observation du contexte, de l’existant, des besoins, ressources… Dès le départ, l’observation en permaculture se démarque de la tendance à une
vision théorique et distante des choses qui prévaut souvent. Il s’agit d’observer et d’interagir ! Le mythe de l’objectivité est ainsi évacué. L’observateur va au contact de sa matière, des choses, des gens. L’interaction est tout autant physique qu’intellectuelle et émotionnelle. Quelques exemples : pour « designer » (concevoir) un lieu, on conseille une phase d’observation de un an, de manière à connaître le site en toute saison et de laisser aux idées et impressions le temps de mûrir. Il ne s’agit pas, bien sûr, de rester un an sans rien faire. Creuser et toucher le sol un peu partout, semer des annuelles et suivre leur évolution, dormir sur le terrain par les nuits chaudes d’été et les nuits froides d’hiver, tester le bruit des bottes après un orage torrentiel, inviter les voisins à manger, aimer certains arbres et d’autres moins, suivre les habitudes d’une mésange nonnette ou un grimpereau des bois… tout cela fait partie de ce principe observer et interagir. De même en contexte urbain : rencontrer les associations, créer un événement avec les voisins, organiser une journée d’échange de plantes, dessiner à la craie sur les trottoirs et échanger avec les passants sont autant d’étapes possibles de « l’observation » du lieu à concevoir.
Les solutions élégantes sont simples voire invisibles
La nature est notre principal guide dans la conception de solutions efficaces et résilientes. Comprendre son fonctionnement et ses structures (les fameux « patterns » anglo-saxons) est à la base du travail de conception en permaculture. Ceci demande une attention permanente et aiguë car, comme le remarque D. Holmgren, « Certains systèmes réellement efficaces fonctionnent si bien qu’on ne les remarque pas. C’est le cas des services environnementaux gratuits, comme la purification de l’air et de l’eau, la réhabilitation des sols et de toutes les solutions conceptuelles efficaces qui passent inaperçues jusqu’à ce qu’elles ne fonctionnent plus faute d’avoir été correctement utilisées. »
Le paysage est la référence à suivre
Travailler avec la nature et non contre elle nécessite une connaissance fine du paysage. Détecter à la pente tel microclimat aride ou frais permettra de choisir judicieusement les plantations, et les implantations du séchoir solaire et du silo qui ont des besoins bien différents. Identifier la végétation spontanée peut permettre d’économiser beaucoup de travail : nul besoin d’implanter un engrais vert dans une zone déjà riche en légumineuses qui jouent déjà ce rôle. Les haies, le vent et les interactions avec les parcelles voisines sont également à observer, tester et ressentir de près.
L’échec est utile tant qu’il est instructif
Tout permaculteur se trouve pilote d’une démarche de Recherche & Développement, à la fois parce que les solutions les plus adaptées à un lieu, un climat et un groupe humain seront toujours particulières et créées en fonction des spécificités locales, mais aussi parce que la permaculture est encore en pleine construction. Appliquer des méthodes de conception et la créativité des concepteurs à des solutions low-tech à même de satisfaire les besoins humains est au cœur de la démarche permaculturelle et des enjeux du siècle. Le concepteur à la recherche de solutions originales et adaptées commencera toujours par observer et tester. Il ne s’agit pas pour autant de réinventer la roue. L’expérience directe est le complément nécessaire à un travail de documentation poussé.
La valeur du scepticisme
Observer et interagir sont les clés de la perception de la complexité des écosystèmes et des groupes humains. Percevoir la complexité, c’est déjà un pas vers le scepticisme, si cher à D. Holmgren : « Le scepticisme et la résistance aux dogmes sont tout aussi essentiels au développement d’une société adaptée à la descente énergétique qu’à la préservation d’une société libre. La nature nous renvoie toujours quantité de signaux, d’avertissements et de questionnements en réponse à nos actions lorsqu’elles sont guidées par la certitude et les croyances. Ce n’est pas une croisade du bien contre le mal ni une solution simpliste universelle qui nous mènera à la descente énergétique, mais un équilibre dynamique entre nos valeurs et nos connaissances nées de l’expérience. » p.105
Pour en savoir plus
L’excellent ouvrage de David Holmgren sur lequel se base cet article : Permaculture, Principes et pistes d’action pour un mode de vie soutenable. Publié Rue de l’échiquier en 2014 en français. Lecture indispensable à qui veut approfondir sa compréhension de la permaculture.
Page présentant l’ensemble des principes de la permaculture.
Site de présentation des principes de Holmgren en français : on y trouve les visuels de la fleurs et des principes en libre téléchargement
Permaculture principles : l’équivalent du site précédant, mais en anglais et plus fourni
Et en cadeau, la synthèse musicale de Charlie Mgee!
Le texte de cette chanson reflète une grande compréhension de la permaculture et mériterait amplement des sous-titres français, avis aux bonnes volontés…