Le 25 juin 2022 se déroulait notre sixième conférence inspirante sur la thématique « Transmission agricole : comment accompagner la nouvelle génération ». Elle faisait témoigner deux maraîchers bio, Paul Thomas de la “Ferme le Pas de Côté”, et François Bodin de la “Ferme de Gisy”.

Vous vous intéressez au sujet de la transmission agricole et de l’accompagnement des agriculteurs ? Vous trouverez dans cette synthèse : un panorama de l’accompagnement à l’installation et la spécificité de l’accompagnement en Essonne.

Cette série de conférences inspirantes a pour but de faire dialoguer les agriculteurs de l’Essonne et les citoyens, et est organisée en partenariat avec Blue Bees, le Programme Sésame de Cœur d’Essonne Agglomération, l’Ademe et Ecocert.

 

Assurer la relève agricole, un enjeu national

Selon la Mutualité Sociale Agricole (MSA), 48% des chefs d’exploitation auront atteint l’âge de départ en retraite d’ici 2030. Ce sont 5 millions d’hectares, soit près de 20% de la surface agricole française, qui s’apprêtent à changer de main dans les huit prochaines années. Un enjeu de taille, lorsque l’on sait qu’il faudrait 20.000 jeunes par an pour compenser ces départs en retraite, alors qu’ils ne sont que 12.500 candidats selon le Ministère de l’Agriculture. Parmi ces candidats, moins d’un sur deux est issu du milieu agricole.
Il est donc crucial de renforcer l’attractivité du métier pour préserver le dynamisme des campagnes et de garantir un approvisionnement alimentaire local aux habitants, tout en assurant la réussite de l’installation de nouveaux agriculteurs.

Selon Paul Thomas et François Bodin, le parcours d’installation s’étend sur deux ans en moyenne. Le projet doit donc être fortement anticipé, tant sur le plan organisationnel qu’économique, à la fois pour les nouveaux agriculteurs et pour les futurs retraités souhaitant passer la main.

 

Panorama de l’accompagnement à l’installation agricole

Un chef d’exploitation est avant tout un chef d’entreprise. Les compétences nécessaires à la pérennisation d’une ferme sont multiples, si bien que les futurs agriculteurs ne peuvent se passer des structures d’accompagnement à l’installation.

C’est le constat partagé par Paul Thomas et François Bodin : la France regorge de structures d’accompagnement et il est essentiel de pouvoir s’appuyer sur des experts de divers domaines :

• Accompagnement en orientation (Chambres d’Agriculture) : il permet d’établir un diagnostic du projet, de valider les compétences des futurs agriculteurs et de les orienter vers les différentes structures d’accompagnement.
• Accompagnement juridique et comptable (Cerfrance, cabinets comptables agricoles…) : il permet de vérifier la viabilité économique du projet et d’établir un plan de financement.
• Accompagnement en recherche de foncier (SAFER, collectivités, Agriculture Paysanne, Terre de Liens…)
• Accompagnement entrepreneurial (Fermes d’Avenir, Abiosol…) : il permet de connaître les clés de la réussite en tant que chef d’exploitation : commerce, comptabilité, marketing…
• Accompagnement financier (aides publiques, Bluebees, conseillers bancaires…) : il permet d’obtenir les fonds nécessaires à la réalisation du projet d’installation.
• Accompagnement technique (GAB, organismes de formation agricole, incubateurs…) : il permet de connaître et tester les techniques agricoles bio adaptées au terrain.
• Accompagnement en transmission et retraite (Chambres d’Agriculture, MSA…) : il permet d’aider les agriculteurs à anticiper leur départ à la retraite et la reprise de leur ferme.

Ces organismes ne doivent pas être considérés comme des structures concurrentes : François Bodin estime que chaque interlocuteur est utile, chaque conseil est précieux.

On observe également de multiples formes d’accompagnement informel où les savoirs se transmettent entre agriculteurs ou entre cédants et repreneurs. Ce fut le cas de Paul Thomas, qui s’est installé sur un terrain de 5000m2 en location : la parcelle appartient à une ferme bio en activité. Les propriétaires sont donc à ses côtés au quotidien et lui transmettent de précieux conseils adaptés au terrain.

 

Le cas spécifique de l’accompagnement agricole en Essonne

L’Essonne est un département où l’installation de jeunes agriculteurs bio est très soutenue par les acteurs publics et associations d’accompagnement. François Bodin et Paul Thomas sont tous deux membres d’Abiosol, association née du partenariat entre la coopérative Champ des Possibles, le réseau AMAP, le GAB d’Ile de France et Terre de Liens. Ce partenariat est jugé pertinent par les agriculteurs membres, dans la mesure où il propose un accompagnement technique, entrepreneurial, foncier et commercial. Il s’agit d’un réel pôle de réussite, qui voit également naître des liens d’entraide entre les nouveaux agriculteurs.

Plusieurs collectivités sont également aux côtés des futurs chefs d’exploitations, ainsi que l’a été la commune de Bièvres avec François Bodin lors de son installation sur un terrain de 5 hectares appartenant à la ville.
Enfin, Paul Thomas et François Bodin relèvent la pertinence de l’accompagnement d’Essonne Active sur le plan financier : l’organisme public propose des prêts d’honneur et des garanties bancaires. L’Essonne est donc un territoire propice à l’installation agricole et continue de renforcer ses dispositifs, notamment grâce au Programme Sésame de l’agglomération Coeur d’Essonne qui vise à renforcer le maillage d’accompagnement de l’agriculture bio locale.

 

Limites et pistes d’amélioration de l’accompagnement à l’installation et la transmission agricole

Tant l’installation que la transmission sont des parcours longs qu’il est essentiel d’anticiper. Si les structures d’accompagnement sont multiples et complémentaires, il reste néanmoins la question de l’investissement et du temps nécessaire à l’installation, qui freinent la concrétisation de nombreux projets.

Pour pallier cet écueil, plusieurs pistes d’amélioration sont évoquées :

• Rémunérer les agriculteurs en activité pour valoriser la transmission de leurs savoirs bien avant leur départ en retraite.
• Faire appel à des financements solidaires : la Ferme de Gisy a par exemple récolté 30.000€ de dons via Bluebees, lui permettant de réduire son besoin en prêt bancaire.
• Louer plutôt qu’acheter, afin de réduire l’investissement de départ : François Bodin propose de créer des “kits d’installation” à louer, regroupant le matériel agricole et un abri de logement temporaire à implanter sur le terrain nu.
• Multiplier les offres “clés en main”, telles qu’en propose l’association Ceinture Verte : les terrains sont déjà acquis et équipés matériellement pour permettre aux néo-agriculteurs de démarrer leur activité au plus vite.

 

Enfin, les agriculteurs en fin de carrière doivent anticiper la reprise de leur ferme plusieurs années avant leur départ en retraite en renforçant la viabilité économique de l’exploitation : une ferme rentable est une ferme qui trouvera plus facilement repreneur. L’accompagnement en gestion ne doit donc pas s’arrêter au parcours d’installation, et doit se prolonger pendant tout le cycle de vie de la ferme.

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